L’Organisation mondiale de la santé alerte sur une superbactérie, connue pour sa résistance aux antibiotiques, qui peut provoquer des infections graves y compris « chez les individus sains ».
L’alerte est donnée, même si le risque au niveau mondial est encore évalué comme modéré. Dans un document publié le 31 juillet dernier, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) explique que les souches de la bactérie klebsiella pneumoniae, considérées comme hypervirulentes, « ont été identifiées avec une fréquence croissante ces dernières années ». Un fait inquiétant puisqu’elles peuvent infecter les personnes en bonne santé et provoquer des épidémies dans les hôpitaux.
« Klebsiella pneumoniae (K. pneumoniae) est une bactérie Gram-négative appartenant à la famille des Enterobacteriaceae », détaille l’OMS. Elle est naturellement présente chez l’homme, au niveau de la partie supérieure de la gorge (nasopharynx) et du tube digestif et peut devenir pathogène lorsqu’elle pénètre dans d’autres parties du corps comme les poumons. On la retrouve aussi dans l’environnement, notamment sur les sols, les eaux de surface, ou encore sur les dispositifs médicaux.
Pourquoi inquiète-t-elle ?
Cette bactérie « est l’une des principales causes d’infections contractées dans les établissements de santé à l’échelle mondiale », note l’OMS qui la considère comme un « pathogène opportuniste », provoquant généralement des infections chez les personnes hospitalisées ou immunodéprimées. Les souches dites « classiques » peuvent engendrer des infections graves comme une pneumonie, des infections des voies urinaires, une infection du sang ou une méningite, lorsqu’elles infectent des personnes immunodéprimées.
Au cours des dernières années, de nombreuses bactéries, dont K. pneumoniae, ont développé une résistance aux antibiotiques. Une souche de la bactérie en particulier de type séquence 23 (hvKp ST23) est capable de résister aux antibiotiques les plus puissants comme les carbapénèmes, utilisés en dernier recours. Cette souche est aussi plus virulente et peut provoquer des infections sévères chez les personnes en bonne santé également.
Combien de cas en France ?
Grâce à son système mondial de surveillance de la résistance aux antimicrobiens, l’OMS a sollicité les pays pour évaluer la situation mondiale. Parmi les 43 qui ont répondu, 16 ont signalé la présence de hvKp, et douze 12 celle de la souche ST23.
Un rapport du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) publié en début d’année indique que le sous-type ST23, détecté dans quatre pays européens en 2021, est désormais présent dans dix pays : au Danemark, en Finlande, en Hongrie, en Irlande, en Italie, en Lettonie, en Lituanie, aux Pays-Bas, en Norvège et en France. Au total, 143 cas ont été détectés.
« C’est un chiffre qui reste faible, mais qui est en augmentation depuis trois ans », estime Dominique Monnet, un responsable pour l’ECDC de la section résistance aux antimicrobiens et infections liées aux soins, cité par Les Echos. L’Hexagone fait partie des pays européens les plus touchés, avec 13 cas entre 2018 et 2023. L’Irlande est davantage concerné avec 87 cas sur la même période. Des chiffres qui pourraient aussi être sous-estimés, du fait de la difficulté à diagnostiquer les infections.
Quelle stratégie pour stopper la propagation ?
Actuellement, la bactérie « peut passer inaperçue, à moins qu’elle ne soit suspectée par des cliniciens connaissant le tableau clinique et demandant que les isolats soient adressés pour une caractérisation ou un séquençage plus approfondi », note l’OMS. L’agence recommande donc aux États membres d’accroître progressivement « leurs capacités de diagnostic en laboratoire afin de permettre (son) identification précoce et fiable » et de prévenir tout risque d’épidémie. Cela passe par le développement de tests moléculaires pour identifier les gènes de virulence en plus des gènes de résistance.